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L’avenir du travail : Cinq facteurs qui changent la donne

Robot picking tomatoes in a greenhouse
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AVERTISSEMENT
Horizons de politiques Canada (Horizons) est une organisation de prospective stratégique au sein du gouvernement du Canada qui a le mandat d’aider le gouvernement à développer des politiques et des programmes axés sur l’avenir, qui sont plus solides et plus résilients face aux changements perturbateurs à l’horizon. Le contenu de ce document ne représente pas nécessairement les idées du gouvernement du Canada, ou des départements et des organismes participants.

Sur cette page

Avant-propos
Introduction
Facteur qui change la donne 1 : L’emploi passe d’être à long terme et axé sur le temps, à temporaire et axé sur les tâches
Facteur qui change la donne 2 : L’IA et l’automatisation pourraient éroder l’emploi bien avant que ces technologies remplacent des emplois dans leur intégralité
Facteur qui change la donne 3 : L’IA met fin à la pénurie de travailleurs du savoir, permettant potentiellement une croissance sans emploi dans les industries du savoir
Facteur qui change la donne 4 : Les technologies numériques combinées peuvent diminuer le rôle et la demande d’intermédiaires humains
Facteur qui change la donne 5 : L’endroit où les gens travaillent et gagnent de l’argent ne correspond pas nécessairement à celui où ils vivent et dépensent
Remerciements
Notes de référence

Avant-propos

Les décennies à venir apporteront des changements significatifs à la nature de l’emploi, y compris au type de travail et à la manière dont il sera effectué, ainsi qu’à l’endroit où il sera accompli et par qui.

L’intelligence artificielle, l’automatisation et la téléprésence peuvent perturber l’emploi tel que nous le connaissons et avoir un impact sur les niveaux d’emploi. De plus, à mesure que davantage de technologies mûrissent et s’associent, les principes fondamentaux organisationnels de l’économie pourraient changer, ayant ainsi une incidence sur la nature de l’emploi. Les perturbations de la quantité et de la qualité du travail pourraient dépasser tous les niveaux que nous avons connus jusqu’à présent.

Ce rapport analyse cinq facteurs qui changent la donne pour l’avenir du travail ainsi que les implications qu’ils pourraient avoir sur les politiques. Le but de ce rapport n’est pas de prédire l’avenir, mais bien d’aider les décideurs à réfléchir sérieusement aux futurs plausibles et à anticiper les défis et les possibilités qui pourraient se présenter pour la croissance économique et le bien-être dans l’ensemble de la société. Nous encourageons les lecteurs à examiner cet aperçu en gardant l’esprit ouvert et à déterminer si leurs organismes et leurs politiques sont prêtes à faire face à ces perturbations.

Guidés par notre mandat, nous espérons susciter la réflexion et le dialogue, et contribuer à la création de politiques et programmes solides face aux changements auxquels pourrait s’attendre le Canada à l’avenir.

Notre analyse de L’avenir du travail repose sur notre prospective de la prochaine économie numérique, laquelle nous vous invitons à consulter. Cette recherche approfondie de prospective a impliqué des recherches, des entrevues et des ateliers. Elle a bénéficié d’une collaboration avec plusieurs ministères et organismes de la fonction publique du Canada, ainsi qu’avec des intervenants, des experts, des universitaires et des organismes non-gouvernementaux. .

Au nom d’Horizons de politiques Canada, j’aimerais remercier les nombreuses personnes qui ont généreusement partagé temps, connaissances et réflexions.

Kristel Van der Elst
Directrice générale, Horizons de politiques Canada


Introduction

Nous vivons une transition vers la prochaine économie numérique, dans laquelle une grande partie de notre activité économique pourrait devenir, de façon numérique, intermédiaire, personnalisée, à la demande et distribuée mondialement. Par conséquent, les modèles de production et de consommation de biens et services sont en pleine mutation, ce qui pourrait affecter autant le volume de l’emploi que sa nature.

À mesure qu’une vaste suite de technologies – telles que les plateformes axées sur les tâches, la téléprésence, l’automatisation, l’intelligence artificielle (IA) et les chaînes de blocs – mûrissent et s’associent, elles sont susceptibles d’avoir un effet particulièrement perturbateur sur l’emploi et son expérience.

Le présent rapport analyse cinq facteurs qui changent la donne vis-à-vis de l’avenir du travail. Un facteur qui change la donne est un changement significatif dans notre manière de penser ou de faire quelque chose. Chaque section décrit les éléments de base du facteur qui change la donne et identifie les implications que celui-ci pourrait avoir sur les politiques publiques.

  1. L’emploi passe d’être à long terme et axé sur le temps, à temporaire et axé sur les tâches. Dans un marché du travail mondialement concurrentiel où plusieurs personnes sont payées à la tâche, comment les gouvernements peuvent-ils garantir que le salaire minimum et les normes d’emploi sont respectés et que les systèmes de soutien social sont efficaces?
  2. L’IA et l’automatisation des tâches pourraient mettre des travailleurs au chômage bien avant que les technologies prennent la place d’emplois dans leur intégralité. Comment les gens réagiraient-ils à la requalification et à la perte d’emploi alors que les tâches pourraient remplacer les emplois en tant qu’unité de base du travail et que celles-ci sont en train d’être automatisées à travers tous les secteurs?
  3. L’IA réduit la pénurie de travailleurs du savoir, permettant potentiellement une croissance sans emploi dans les industries du savoir. Si le savoir et certaines formes d’intelligence peuvent être reproduites lorsque nécessaire, que pourrait-il arriver au travail cognitif et aux professions « intellectuelles » à l’avenir?
  4. La combinaison de technologies numériques pourrait réduire la demande d’humains intermédiaires qui assurent confiance et sécurité. Que pourrait-il arriver si la technologie élimine les rôles transactionnels humains de la main-d’œuvre?
  5. L’endroit où les gens travaillent et gagnent de l’argent ne correspond pas nécessairement à celui où ils vivent et dépensent. Que pourrait-il arriver à la taxation, aux avantages sociaux et à l’économie secondaire lorsqu’une personne peut vivre n’importe où au monde mais travailler au Canada, ou vice-versa?

Examiner ces changements peut aider à identifier les potentiels défis et possibilités, qui assurent la base d’un dialogue productif sur les politiques axées vers l’avenir.


Facteur qui change la donne 1 : L’emploi passe d’être à long terme et axé sur le temps, à temporaire et axé sur les tâches

Soutenus par les technologies numériques, les emplois sont divisés en plusieurs tâches distinctes qui peuvent être accomplies séparément et recombinées pour atteindre le résultat souhaité.

Groupe de personnes dans la rue avec des scores de réputation au-dessus de leur tête

Ceci facilite le fait de payer pour les tâches, plutôt que pour le temps consacré. En fractionnant les emplois en tâches discrètes avec une valeur à la pièce, de nouvelles façons de faire, de rémunérer et d’évaluer le travail sont en train d’être vécues dans l’économie à la demande[1].

À mesure que de plus en plus d’emplois sont fractionnés en tâches, davantage de travail peut être téléchargé sur des plateformes de travail axé sur les tâches. Les plateformes de travail numériques, sur lesquelles on peut acheter ou vendre des tâches, facilitent encore plus le fractionnement et la distribution des emplois[2], et permettent aux employeurs de fixer le prix qu’ils sont prêts à payer pour certaines tâches. Ces tâches peuvent être confiées à des travailleurs peu rémunérés, au lieu d’être attribuées à des employés permanents responsables d’un projet complet. Les travailleurs font des offres sur des tâches spécifiques affichées par les employeurs. Ils peuvent également définir un taux fixe pour certaines tâches, pour lesquelles les employeurs pourraient les sélectionner. Transférer le travail à des plateformes pourrait avoir une incidence sur la rémunération d’une personne, ce qui changerait la rémunération du salaire et des taux horaires au travail à la pièce.

Le travail axé sur les tâches et la rémunération reposent largement sur les systèmes de réputation. Plusieurs plateformes de travail utilisent des systèmes de réputation pour aider les travailleurs, les clients et les employeurs à choisir ce qui leur convient. Ces systèmes mesurent et fournissent la crédibilité, les performances, les compétences et, potentiel-lement, les facteurs personnels du travailleur, ainsi qu’à quel point il peut être sympathique[3]. Certains systèmes quantifient la réputation de manière intensive en utilisant des algorithmes pour évaluer les personnes sur des données provenant de nombreux aspects de leur vie.

Le système de crédit Sesame[4] et le système expérimental d’octroi de crédit[5] analysent de grandes quantités de données collectées via des applications et d’autres sources afin d’évaluer les utilisateurs en fonction de leur comportement. Ces systèmes de plus en plus sophistiqués et potentiellement envahissants pourraient être mis en œuvre sur des plateformes axées sur les tâches à mesure que ce modèle d’évaluation se généralisera.

Plateformes et salaires
Une étude réalisée en 2018 sur 3,8 millions de tâches sur la plateforme Mechanical Turk d’Amazon a révélé un salaire horaire médian d’environ 2$ US sur sa plateforme, dont 96% gagnent moins que le salaire minimum américain, soit 7,25 $/heure.

Implications

Les conditions et les modèles commerciaux de l’économie à la demande pourraient déborder dans tous les emplois de manière imprévisible, que le travail soit en ligne ou non. Une étude du Forum Économique Mondial a révélé que 50% des grandes entreprises interrogées devraient réduire leurs effectifs permanents, tandis que 48% devraient engager des entrepreneurs spécialisés plutôt que des employés. Seulement 38% devraient augmenter leurs effectifs permanents[6]. Essentiellement, une entreprise peut faire passer n’importe quel emploi susceptible au fractionnement d’une rémunération fondée sur le temps à une rémunération fondée sur les tâches. Déjà, « selon les économistes Alan Krueger et Lawrence Katz, le pourcentage de personnes engagées dans des ‟formules de travail alternatives” (pigistes, entrepreneurs, travailleurs sur appel et intérimaires) a augmenté de 10,1% en 2005 à 15,8% en 2015. Leur rapport a révélé que presque tous – ou 94% – les emplois nets créés entre 2005 et 2015 faisaient partie de ce type d’emplois non permanents. »[7] Certaines sources prévoient que le nombre de travailleurs sous contrat pourrait être bientôt égal à celui des travailleurs qui occupent des postes à plein temps.[8]

Les relations conventionnelles employeur-employé pourraient devenir moins courantes. Les employeurs peuvent hésiter à assumer les responsabilités associées aux employés à temps plein dans un monde en mutation rapide s’ils peuvent engager des travailleurs flexibles à la demande ou des technologies d’automatisation ne nécessitant pas de soutien pour l’amélioration des compétences, la retraite ou les vacances.

Certaines entreprises offrant des biens et services standardisés pourraient être fortement automatisées et ne retenir que très peu de travailleurs, voire aucun. Ces entreprises peuvent sous-traiter bon nombre de leurs fonctions à des travailleurs à la demande ou à d’autres entreprises spécialisées utilisant des intermédiaires d’IA. Si l’IA et les travailleurs à la demande, sans indemnités de maladie ou de chômage, remplacent les employés conventionnels, les contributions des entreprises aux programmes sociaux pourraient diminuer.

Cela pourrait mettre à l’épreuve les soutiens sociaux tels que les régimes de retraites, les avantages de soins de santé privés et la formation, qui dépendent en grande partie des relations conventionnelles employeur-employé dans le contexte d’une entreprise. Si ces relations de travail conventionnelles sont réduites dans la prochaine économie numérique, les citoyens pourraient compter sur le gouvernement pour assumer une plus grande part du fardeau de ces aides.

L’effet global sur les salaires moyens n’est pas clair, mais une polarisation accrue des salaires semble probable. Les salaires réels des travailleurs à compétences limitées qui ne peuvent pas être automatisées ou complémenter l’automatisation augmenteraient probablement par rapport à ceux dont les compétences peuvent être remplacées.

La répartition inégale des pertes d’emploi et de salaire induites par le numérique pourrait aggraver les inégalités. Si le coût des biens et des services diminue parallèlement à la réduction des coûts de main-d’œuvre, certains individus ou groupes peuvent se sentir plus riches, même si leurs revenus stagnent. En résumé, ceux qui conservent un emploi pourraient être «mieux lotis» même avec une croissance réelle des salaires nulle. Inversement, ceux qui perdent leur emploi pourraient voir un bénéfice minime lié à la réduction des coûts des biens et des services. Les choix de carrière et d’éducation peuvent varier en fonction du mode et du lieu de répartition des salaires. La disparité pourrait se creuser entre les travailleurs du secteur des plates-formes numériques mondiales et ceux des économies locales protégés par des lois sur le salaire minimum ou d’autres avantages légaux. Un emploi de barman offrant 15 dollars de l’heure sécurisés au Canada pourrait être une carrière plus attrayante qu’un travailleur auxiliaire de concert parajuriste effectuant un travail à la pièce en ligne à un taux de 10 $ l’heure.

Les travailleurs canadiens peuvent se trouver désavantagés par des systèmes de réputation exploités en dehors de la juridiction canadienne. Les systèmes de réputation développés dans d’autres contextes réglementaires et de gouvernance pourraient introduire des formes de discrimination ou des conditions d’emploi interdites par la loi canadienne. Pourtant, les Canadiens pourraient se sentir obligés de se joindre à eux pour rester engagés et compétitifs sur un marché mondial axé sur les tâches.

Systèmes de réputation : Sesame Credit[9]

  • Lancé par Alibaba’s Ant Financial
  • 520 millions d’utilisateurs (à partir de 2017)
  • Les scores sont générés à travers de vastes réseaux de collecte de données
  • Les scores sont basés sur l’historique de crédit, la situation financière, le comportement, les caractéristiques personnelles et les relations interpersonnelles.
Représentation de'une personne mise en évidence grâce à un système de réputation. Il montre une foule de personnages en bâtonnets, dont l'un est surligné en rouge au centre.

Facteur qui change la donne 2 :
L’IA et l’automatisation pourraient éroder l’emploi bien avant que ces technologies remplacent des emplois dans leur intégralité’

Même des emplois trop complexes pour qu’ils soient complètement automatisés pourraient changer de façon radicale à mesure que de nouvelles technologies permettent l’automatisation de tâches particulières.

Bras robotisé dans une usine automatisée déplaçant une boîte fermée

Présumer que beaucoup d’emplois seront à l’abri de l’automatisation parce qu’ils sont trop complexes à gérer par l’IA et les robots, actuellement ou dans un avenir prévisible, est risqué. La capacité qu’ont les technologies numériques à fractionner les emplois en tâches rend cette hypothèse vulnérable. Ce que nous considérons comme un emploi aujourd’hui pourrait être divisé en plusieurs tâches, dont certaines peuvent être effectuées par des machines soit maintenant ou dans un avenir rapproché.

Plusieurs emplois appartiennent à la catégorie de « pourraient être partiellement automatisés ». Par exemple, une compagnie d’IA[10] offre des assistants d’IA qui peuvent faire de la planification, préparer des exposés et programmer des réunions. Celle-ci accélère aussi la recherche des entreprises en automatisant l’accès aux données d’organismes. Sans remplacer un emploi dans son intégralité, cette application d’IA remplace plusieurs tâches discrètes qui sont au sein de postes administratifs conventionnels.

L’IA et l’automatisation pourraient transformer le travail et avoir un effet sur les niveaux d’emploi bien avant que ceux-ci remplacent des emplois dans leur intégralité. L’effort humain pourrait être recentré sur les tâches restantes, qui ne peuvent être automatisées. Ceci pourrait réduire la quantité de travail humain nécessaire pour répondre aux demandes et fournir des avantages significatifs par rapport aux humains et aux technologies de pointes qui agissent en isolation. Dans le camionnage de longue distance, par exemple, nous pourrions voir la partie la plus longue et la plus facile – la conduite sur l’autoroute – être attribuée à un camion autonome, avec intervention humaine durant les voyages courts et plus complexes, c’est-à-dire du port à l’autoroute et de l’autoroute à la destination finale. Des convois entiers de camions peuvent déjà être conduits par un seul conducteur principal[11], éliminant le besoin d’avoir plusieurs conducteurs.

L’IA dans les ressources humaines[12]

  • Analyse des comportements et des traits afin d’identifier des compétences professionnelles essentielles
  • Sélectionne les candidats en fonction des compétences identifiées
  • Utilise l’analyse prédictive pour prévoir dans quelle mesure le candidat convient au poste
  • Identifie les employés qui sont à risque de quitter l’emploi ou de violer les conditions d’emploi

Une conception de lieu de travail centré sur les robots pourrait réduire les entraves à l’automatisation. Une conception de lieu de travail orienté sur l’humain limite l’automatisation dans certains secteurs. Toutefois, à mesure que les entreprises agrandissent leurs lieux de travail pour accommoder les machines, la demande de travailleurs humains pourrait baisser plus rapidement que prévu. Par exemple, des entrepôts d’épiceries conçus récemment n’ont pas d’étagères conventionnelles. De ce fait, les machines peuvent bouger aisément le long d’une grille de pistes et se pencher au niveau des bacs de stockage.[13] Tout comme les robots éprouvent de la difficulté vis-à-vis des étagères conçues pour les humains, les humains trouveraient difficile de parcourir une grande partie de cet environnement de travail centré sur les robots. La conception de lieu de travail axée sur l’automatisation pourrait réduire la demande de travailleurs humains dans des environnements complexes.

Implications

Des emplois pourraient disparaître rapidement alors que les effets cumulatifs de l’automatisation des tâches réduisent la demande de travail humain à travers plusieurs secteurs.  

Le fractionnement des emplois en tâches pourrait avoir un effet de cascade à travers l’économie simultanément. Dans le passé, des travailleurs qui ont perdu leur emploi dans un secteur en déclin pourraient avoir trouvé du travail semblable dans un autre secteur. Dans la prochaine économie numérique, les tâches automatisées dans un secteur le seront probablement dans tous les secteurs, rendant des lignes de travail entières rares ou obsolètes à travers l’économie.

Nous pourrions voir apparaître du chômage structurel à long terme. Les modèles cycliques conventionnels qui supposent un retour à l’équilibre après une période de pertes d’emplois pourraient ne plus être admis. Une hausse du chômage pourrait en résulter, à court et à moyen terme, alors que certains emplois disparaissent. Dans le modèle standard, l’emploi pourrait retrouver son équilibre à la longue, à mesure que les salaires réels s’ajustent, que les travailleurs acquièrent de nouvelles compétences et que les revenus totaux plus élevés créent une demande de biens et services. Toutefois, les profondes mutations causées par la combinaison du travail à la demande et de l’automatisation pourraient aussi créer une nouvelle réalité structurelle et invalider les hypothèses conventionnelles.

Il y a encore beaucoup à apprendre pour déterminer si le recyclage ou la reconversion des travailleurs ayant perdu leur emploi en raison de l’automatisation des tâches est possible et selon quelles modalités. Les possibilités d’emploi demeureront probablement dans les emplois existants qui ne sont pas automatisés, dans ceux qui sont transformés et dans ceux qui sont entièrement créés dans la prochaine économie numérique. Toutefois, les compétences et mentalités évolutives nécessaires à ces emplois restent nébuleuses. Même si celles-ci deviennent plus claires, les développer parmi des travailleurs au chômage pourrait nécessiter des investissements considérables de temps et d’argent. Pour certains, cela pourrait même se révéler être impossible.

Une coopération étroite entre les humains et les machines pourrait augmenter, menant à une efficacité et à des résultats qui sont meilleurs, et à une élimination de tâches automatisables. Ce type de travail – parfois appelé travail de centaure – place les humains et les machines en équipe et chaque unité travaille en fonction de ses forces.[14] Le travail de centaure pourrait changer l’expérience de travail de bien des travailleurs, même améliorer le travail et lui donner une plus grande signification. Les robots peuvent assumer les tâches routinières, répétitives et dangereuses, permettant aux membres humains de l’équipe de se concentrer sur des activités créatives, de valeur plus élevée.

Ceci pourrait entraîner une hausse de la productivité chez les entreprises et de meilleurs résultats sur les plans de la sécurité et de la satisfaction des travailleurs. D’un autre côté, si les membres humains de l’équipe passent plus de temps sur des tâches complexes sans répit, ils pourraient connaître du stress ajouté et de l’épuisement professionnel.

CENTAURO[15]

  • Système intégré homme-robot pour les secours aux sinistrés
  • Opération d’un robot par l’humain par le biais d’une combinaison de téléprésence intégrale avec retour haptique
  • Permet au robot d’entrer dans des zones sinistrées inadaptées aux humains et de les aider dans les opérations de secours et le nettoyage
  • Rétroaction situationnelle partagée entre l’homme et le robot via la réalité augmentée (RA) pour la prise de décision

Facteur qui change la donne 3 :
L’IA met fin à la pénurie de travailleurs du savoir, permettant potentiellement une croissance sans emploi dans les industries du savoir

L’IA a le potentiel de réduire la pénurie de travailleurs du savoir et d’améliorer le savoir-faire à travers les secteurs.

L’IA pourrait réduire la pénurie de travailleurs du savoir. Ajouter une capacité de travail axé sur le savoir nécessite actuellement des ressources pour recruter, former, rémunérer et gérer les personnes supplémentaires. Cependant, les entreprises pourraient être capables de copier de l’IA conçue pour recueillir et appliquer un savoir spécifique aux tâches, et ce, à un coût marginal presque nul. Ceci offre aux entreprises une alternative à faible coût à l’embauche de personnes supplémentaires, avec tous les coûts conventionnels reliés aux finances et aux ressources humaines. Ceci est déjà en train de se produire dans plusieurs secteurs axés sur le savoir :

  • En comptabilité et en finance, il existe des applications qui utilisent l’IA afin d’aider les travailleurs indépendants et les PMEs à automatiser leurs systèmes d’information financière et de comptabilité.[16] Les solutions d’IA aident les banques et les prêteurs de crédit à prendre des décisions plus intelligentes en matière de souscription.[17]
  • Dans la science des données, il y a une forte demande[18] pour de l’IA existante qui automatise le travail des scientifiques des données. Une telle IA utilise de grandes données afin d’aider les entreprises à prendre des décisions sur des sujets tels que la gestion de patrimoine, le marketing direct et le prêt.[19]
  • En ressources humaines, il existe plusieurs applications fondées sur l’IA qui aident dans les domaines tels que le recrutement, l’évaluation et la rétention. Une de ces applications analyse de l’information sur les employés pour détecter si quelqu’un est susceptible de quitter l’emploi ou de commettre des infractions à la sécurité.[20]

Le travail de centaure pourrait aussi avoir un impact sur les industries du savoir. Bien que l’IA puisse complètement remplacer le savoir dans certains secteurs, le fait de combiner l’IA et les humains pourrait être la clé pour augmenter la capacité de travail du savoir. L’IA est capable d’apprendre de plusieurs experts humains et d’acquérir des connaissances fondées sur leur expérience et leur savoir-faire collectifs. Ceci fait de l’IA une ressource précieuse pour les humains dans le but de complémenter leur savoir-faire existant dans les industries du savoir. Dans l’industrie de la santé, l’IA aide les médecins dans leurs diagnostics. Par exemple, Watson Health[21] travaille avec des médecins dans le but d’améliorer leur capacité à diagnostiquer des maladies avec précision et rapidité. Il a été en mesure de diagnostiquer le cancer du poumon de façon exacte à 90% comparé à 50% chez les médecins humains.[22] Bien que l’IA ait prouvé qu’elle est efficace dans certains domaines à ce jour, son potentiel dépend du contexte. Par exemple, certaines IAs excellent en radiologie[23] et en analyse de données.[24] Toutefois, l’IA éprouve encore de la difficulté vis-à-vis des tâches plus générales et peut connaître de la confusion lorsqu’elle essaie de distinguer un chiot chihuahua d’un muffin aux bleuets, à titre d’exemple.[25] Les humains travaillant avec les IAs pourraient traiter davantage de volume tout en évitant les erreurs spécifiques à l’IA.

Plusieurs fusions et acquisitions importantes entre des compagnies de santé et de technologie des dernières années mettent en évidence l’impact que l’IA, Big Data et l’internet des objets ont déjà sur un secteur du savoir. Ces fusions apportent de nouveaux services en ligne, mais perturbent également les schémas conventionnels de travail axé sur le savoir et l’emploi.

Voici des exemples de fusions et d’acquisitions dans les domaines de la santé et de la technologie en 2018 : [26] 

Roche & Flatiron Health
Roche, une multinationale spécialisée dans les soins de santé personnalisés, qui vise à devenir un leader mondial de la santé personnalisée (associant la biologie humaine à l’analyse de données), a acheté Flatiron Health. Flatiron est une plateforme de données dédiée à l’oncologie, dont la mission est de lutter contre le cancer en mettant en contact des chercheurs médicaux, des praticiens et des régulateurs.

Headspace & Alpine.AI
Headspace est une application de méditation et de prise de conscience co-créée par un moine bouddhiste. Cette fusion peut suggérer une tendance à l’intégration de l’IA dans le domaine de la santé mentale. Il vise à donner aux utilisateurs l’accès à des gourous de la conscience virtuelle.

Medtronic & Nutrino
Le géant de la gestion du diabète Medtronic a acheté Nutrino, une plate-forme d’IA conçue pour améliorer les résultats pour la santé en collectant et en analysant des données personnelles sur la consommation alimentaire et en les associant à des changements physiologiques. L’accumulation de telles données sur les diabétiques et la population en général pourrait avoir des effets profonds sur les futurs traitements de santé.

Le co-fondateur de Withings rachète la société Nokia
Withings est une société de surveillance de la santé qui fabrique des appareils intelligents conçus pour suivre les données relatives à la santé et au mode de vie et fournir des conseils personnalisés. Les exemples passent de balances intelligentes capables de suivre l’IMC à des moniteurs de sommeil à des tensiomètres avec ECG intégré.

Muse & Meditation Studio
Muse est la société derrière un serre-tête à capteur cérébral (combinant neurosciences, design de mode et psychothérapie) qui suit et rend compte de l’activité cérébrale liée au stress et à l’anxiété. Muse a acheté Meditation Studio, dont les experts de la pleine conscience donnent aux utilisateurs de Muse des conseils à partir de données sur comment réduire le stress et l’anxiété, renforcer la confiance en soi et améliorer le sommeil.

Autres exemples de grandes fusions et acquisitions dans le secteur de la santé :

  1. Logisticare & Circulation (en partenariat avec Uber et Lyft)
  2. Dexcom & TypeZero
  3. Fitbit & Twine Health
  4. Amazon & PillPack
  5. Best Buy & GreatCall

Implications

Le pouvoir transformateur de la prochaine économie numérique ne sera pas limité au travail du savoir peu qualifié. Comme l’IA réduit le manque de connaissances, elle peut avoir des répercussions considérables sur les emplois du savoir hautement qualifiés, tels que les professions médicales, ainsi que les emplois du savoir peu qualifiés, tels que la saisie de données. L’automatisation ne tient pas compte du statut professionnel, bien que les règles et les normes puissent ralentir l’automatisation dans certaines professions réglementées.

Il y a un potentiel de croissance sans emploi dans les industries du savoir si d’ajouter de la capacité de travail axé sur le savoir devient un effort de « couper-coller » plutôt qu’un effort d’« embaucher et former ». Les entreprises pourraient décider d’accroître leur capacité en faisant l’acquisition d’IA reproductibles et pouvant être mises à jour au lieu d’embaucher de nouveaux travailleurs du savoir. Les entreprises pourraient connaître une croissance économique sans créer d’emplois. En même temps, les emplois de certaines catégories d’emplois du savoir pourraient disparaître, créant une surabondance de compétences et une demande croissante de soutien social.

Les gains résultant de la croissance sans emploi dans les industries du savoir pourraient être saisis principalement par les méga-entreprises. Les données représentent la base de la création d’une IA réussie – de grands réservoirs de données. Dans ce qui est essentiellement une économie d’effet de réseau, peu d’entreprises pourraient avoir accès à de tels réservoirs. Cela pourrait faire de la concentration du marché une préoccupation majeure et susciter des appels à une réglementation sur la collecte de données et l’utiliser pour opposer les méga-entreprises aux consommateurs, aux petits concurrents et aux gouvernements. Le droit de la concurrence et les régimes de protection des données pourraient être des facteurs majeurs de la structure globale de l’économie émergente.

La numérisation continue de l’économie pourrait créer une période turbulente de « destruction créatrice » et de concurrence féroce. Les entreprises fondées sur des modèles traditionnels peuvent avoir du mal à survivre à mesure que de nouveaux entrants apparaissent ou quittent d’autres secteurs. Dans un tel monde, les entreprises peuvent éviter de prendre des engagements futurs, tels que des employés humains, pour rester habiles, ce qui pourrait réduire l’emploi dans certains secteurs. Cependant, l’hyper-concurrence pourrait également rendre certaines compétences humaines encore plus utiles.

LawGeex[27]

  • L’IA examinera les contrats pour aider les avocats en poste
  • Conçue pour détecter les défauts ou les erreurs dans les contrats
  • Les contrats sont comparés aux politiques légales des entreprises pour assurer la compatibilité[28]
  • Cette IA a surpassé 20 des meilleurs avocats d’entreprise américains[29] dans un concours pour repérer des problèmes dans des accords de non-divulgation
  • L’objectif est de libérer du temps que les avocats consacrent à des questions plus complexes.

Facteur qui change la donne 4 :
Les technologies numériques combinées peuvent diminuer le rôle et la demande d’intermédiaires humains

Dans la prochaine économie numérique, tout emploi comprenant principalement de la facilitation d’accords ou de transactions entre des êtres humains pourrait être en péril.

Usine automatisée produisant du chocolat

Les technologies de chaînes de blocs peuvent renforcer la confiance dans de nombreuses transactions, éliminant ainsi le besoin de garants humains tels que les employés de banque et les avocats. En outre, les contrats intelligents axés sur des chaînes de blocs permettent le paiement automatisé à la livraison. Une nouvelle université en démarrage propose d’utiliser des contrats intelligents et des chaînes de blocs pour administrer et suivre les frais de scolarité, les crédits et les diplômes de ses étudiants.[30] De même, une grande société de technologie se tourne vers des contrats intelligents de chaînes de blocs pour le paiement de redevances.[31]

Des capteurs intégrés à l’internet des objets peuvent déterminer le moment où un produit ou un service est requis. Par exemple, une grande entreprise d’électroménagers a un réfrigérateur qui utilise un assistant d’IA activé par caméra pour détecter, étiqueter et répertorier les aliments, rappelant ainsi aux consommateurs qu’il est temps d’acheter certains articles.[32] La technologie de capteurs est particulièrement utile dans la planification d’entretien des machines. Les programmes d’entretien prédictif[33] administrés par l’IA, qui extrait les données des capteurs intégrés, éliminent les conjectures et améliorent la planification, ce qui minimise les temps d’arrêt des machines.

Les IAs peuvent négocier des conditions optimales et passer des commandes. Par exemple, les services de magasinage et de diffusion en ligne populaires proposent déjà des options fondées sur la consommation passée.[34]

Les usines automatisées utilisant des technologies de fabrication avancées telles que l’impression 3D pourraient produire de manière autonome des produits personnalisés à la demande, tandis que la logistique automatisée pourrait livrer les produits aux utilisateurs finaux. Récemment, une grande compagnie de transport et une grande entreprise de technologie ont lancé une solution de chaîne d’approvisionnement[35] transfrontalière utilisant les chaînes de blocs pour gérer les transactions entre expéditeurs, transitaires, transporteurs maritimes, ports et autorités douanières. D’autres entreprises testent des systèmes de livraison de dronesde commerce électronique[36]entièrement automatisés.[37]

Contrats intelligents[38]

  • Contrats juridiquement contraignants aidés par l’IA
  • Des agents d’IA d’assistance personnalisée pour vous guider à travers les accords juridiques et vous informer de vos devoirs et droits légaux
  • Les contrats sont mis en langage codé sur la chaîne de blocs tout en donnant au propriétaire un document contraignant écrit de façon naturelle, à signer numériquement par tous les partis

Implications

Dans l’ensemble de la chaîne de valeur, de nombreuses tâches effectuées par des intermédiaires humains pourraient être remplacées par la technologie. En remplaçant les travailleurs humains par des technologies capables de fonctionner plus rapidement, à moindre coût et à friction quasi nulle, les entreprises peuvent réduire leurs coûts tout en améliorant leur efficacité. Ces gains d’efficacité pourraient permettre des cycles de production courts, voire personnalisés, rendant les chaînes de valeur transitoires. Lorsque le coût de la personnalisation diminue, les objets sur mesure produits localement peuvent entrer en concurrence avec le prix des objets produits par lots, créant ainsi des « chaînes de valeur contextuelles ». Les produits résultants pourraient utiliser moins de matériaux, répondre aux spécifications de l’utilisateur et réduire les besoins d’entreposage et de transport de longues distances.

La perte d’emplois de cols blancs pourrait être considérable à travers les secteurs. De nombreux emplois de cols blancs qui jouent le rôle d’intermédiaire pourraient être considérablement réduits. Les finances, le droit et le courtage pourraient connaître une contraction majeure de l’emploi face à ces nouvelles technologies. Les professions traditionnelles devront peut-être se redéfinir au cours de la transition vers la prochaine économie numérique.

Les contractions dans les professions pourraient perturber un certain nombre de structures de soutien, ayant des conséquences importantes sur l’emploi. Les associations professionnelles pourraient disparaître à mesure que les professions diminuent et que certaines de leurs fonctions d’accréditation passent à des technologies intermédiaires.

Services de santé : e-estonia[39]

  • Dossier de santé en ligne pour chaque citoyen
  • Carte d’identité électronique axée sur les chaînes de blocs afin que les informations de santé sécurisées soient accessibles aux partis autorisés
  • Un seul espace pour l’ensemble du dossier médical du patient
  • e-ambulance et e-prescriptoins pour optimiser les interventions d’urgence et les traitements médicaux

Facteur qui change la donne 5 :
L’endroit où les gens travaillent et gagnent de l’argent ne correspond pas nécessairement à celui où ils vivent et dépensent

À l’avenir, les plateformes de travail à la demande ainsi que les avancées en matière de téléprésence et d’automatisation peut vouloir dire que les personnes ne travaillent et ne gagnent pas leur vie là où elles vivent et dépensent.

Les tâches axées sur le savoir peuvent déjà être assignées à des travailleurs n’importe où. Certains emplois du savoir, tels que l’écriture et la conception graphique, sont décomposés en tâches distinctes et distribués via des plateformes en ligne. Les travailleurs peuvent effectuer ces tâches de n’importe quel endroit. Le Canada est déjà l’un des plus importants fournisseurs et demandeurs de main-d’œuvre en ligne sur des plateformes
de travail.[40]

La téléprésence de pointe permet aux travailleurs d’effectuer des tâches physiques à partir d’un endroit distant. Les technologies de téléprésence évoluent pour permettre aux gens d’interagir de manière transparente avec d’autres personnes et des machines à distance. Les progrès de la réalité virtuelle (RV), de la réalité augmentée (RA), de la réalité mixte (RM) et des robots réduisent la nécessité pour les personnes de partager un espace physique ou d’être présentes sur un chantier. Par exemple, les nouvelles techniques d’extraction impliquent un niveau élevé d’automatisation du forage et du transport des matériaux. Ces opérations automatisées peuvent être contrôlées depuis un bureau éloigné du site d’extraction.[41] De même, les entreprises forestières testent des camions forestiers automoteurs, des drones qui plantent des arbres et des systèmes automatisés de gestion de forêt.[42] Dans les secteurs pétrolier et gazier, l’automatisation et les robots sont utilisés pour inspecter les infrastructures et effectuer des diagnostics dans les zones nécessitant des réparations.[43]Il existe également un recours accru aux services de télémédecine (consultations, surveillance et interventions) pour améliorer l’accès aux services de soins de santé dans les régions éloignées.[44]

Le télétravail permet aux gens de choisir leur lieu de résidence ; à présent, certains endroits offrent des incitations à y vivre (et à y dépenser).

La RA, la RV et la RM offrent aux utilisateurs différentes façons de vivre la simulation et la collaboration à distance. En réalité virtuelle, les utilisateurs font l’expérience d’un environnement entièrement numérique, les coupant du monde physique qui les entoure. La RA superpose des objets et des informations numériques interactifs dans le monde réel. Cela peut être testé sur un téléphone intelligent ou avec des lunettes intelligentes. Une société de magasinage en ligne[48] propose la RA dans son application de magasinage, permettant aux utilisateurs de placer virtuellement des produits dans leur maison afin de les « tester ». La RM associe plus étroitement les mondes physique et virtuel, permettant ainsi aux utilisateurs de manipuler des objets virtuels et physiques qui interagissent entre eux.

En Europe, ces technologies sont utilisées pour former des agents de lutte contre le terrorisme et des premiers intervenants. Grâce au Générateur automatisé de scénarios de jeu sérieux pour la formation en réalité mixte, les stagiaires d’organises de toute l’Europe peuvent interagir dans un seul scénario de sécurité virtuelle. La RM permet également aux équipes de s’exercer dans des lieux réels enrichis de constructions numériques interactives.

Implications

Si le travail n’est plus lié au lieu de résidence des personnes, il pourrait y avoir concurrence entre les juridictions pour inciter les gens à vivre et à y dépenser. Certaines juridictions offrent déjà[49] des incitations économiques aux travailleurs distants pour qu’ils déménagent et dépensent leur dans la juridiction. Cela pourrait conduire à de nouveaux types de gagnants et de perdants : des zones pouvant offrir des commodités et un style de vie attrayants, tels que des quartiers piétonniers sécurisés, des espaces verts et de bonnes écoles publiques, pourraient faire en sorte que les populations de travailleurs distants (et les revenus tirés des consommateurs) s’éloignent de lieux moins attrayants.

Si des activités économiques majeures telles que l’extraction des ressources peuvent être réalisées à distance, les économies secondaires qui dépendent des salaires tirés des emplois de l’économie primaire locale pourraient être durement touchées. Avec moins d’emplois et des retombées économiques moins importantes, les entreprises devront peut-être trouver de nouveaux moyens d’obtenir le soutien des communautés, y compris des détenteurs de droits autochtones, où elles espèrent faire leurs activités.

Si les restrictions géographiques sur l’emploi disparaissent grâce à la combinaison du fractionnement et des technologies numériques, un marché du travail mondial hautement concurrentiel pourrait émerger, éliminant les pénuries locales pour de nombreux types d’expertise cognitive et physique. Cela pourrait avoir une incidence sur les cols blancs et les cols bleus. Les salaires pour des tâches similaires pourraient converger dans toutes les juridictions participantes. Bien que cela puisse profiter aux personnes possédant des compétences extrêmement rares, cela pourrait désavantager les autres, en particulier ceux qui vivent dans des zones où le coût de la vie est élevé. Ces travailleurs pourraient avoir du mal à concurrencer ceux dont le coût de la vie moins élevé permet de réduire les tâches, ce qui réduit effectivement les taux de rémunération à la pièce pour tous.

La téléprésence pourrait changer la définition et la répartition des compétences dans l’ensemble de l’économie. La téléprésence de pointe évite aux experts d’être sur place pour effectuer des tâches. Cela pourrait donner lieu à des services de « télé-grognement », dans lesquels des experts externes utilisent la téléprésence pour diriger des travailleurs peu qualifiés effectuant des tâches complexes sur le site. Les nouveaux types de travail de téléprésence qui émergent, ainsi que l’utilisation de cette technologie pour la formation, pourraient nécessiter de nouvelles compétences. Par exemple, le fonctionnement à distance de machines à l’aide d’un contrôleur peut nécessiter des aptitudes différentes de celles liées au fonctionnement physique sur le site. Cela pourrait conduire au remplacement de « l’expérience de travail » par « l’expérience des compétences » sur le marché de l’emploi.

Programme Mine du futur de Rio Tinto[50]

  • Systèmes de transport autonomes, y compris les camions et les trains pour transporter des matériaux
  • Des systèmes de forage automatisés visant à permettre à un seul opérateur d’exploiter plusieurs appareils de forage à partir d’un seul endroit

L’administration de la fiscalité pourrait être plus difficile. Il sera de plus en plus difficile d’identifier où se trouvent les transactions et où la valeur est créée. Les états pourraient avoir du mal à percevoir les impôts sur le revenu des citoyens qui travaillent dans d’autres juridictions via des plateformes travail à la demande, en particulier si ces plateformes hésitent à percevoir des taxes ou à partager des données. Les taxes de consommation pourraient également être plus difficiles à percevoir, car l’économie délaisse les biens matériels pour se tourner vers les biens et services numériques, qui sont plus difficiles à surveiller. Les difficultés rencontrées pour assurer les sources de revenus pourraient encourager la coopération internationale en matière de conventions fiscales, mais pourraient également inciter les états à se livrer une concurrence acharnée pour obtenir des revenus en baisse.


Remerciements

Le présent rapport est le résultat d’une vaste prospective économique réalisée par Horizons de politiques Canada dans le but d’examiner cinq facteurs qui changent la donne pour l’avenir du travail ainsi que les implications qu’ils pourraient avoir sur les politiques. Ce travail a impliqué des recherches, des entrevues et des ateliers en collaboration avec plusieurs ministères et organismes de la fonction publique fédérale, ainsi que des intervenants et des experts externes.        

Les membres de l’équipe du projet sur L’avenir du travail
Marcus Ballinger, Gestionnaire
Martin Berry, Analyste en prospective
Steffen Christensen, Analyste principal en prospective
Pierre-Olivier DesMarchais, Analyste en prospective
Avalyne Diotte, Analyste en prospective
Jennifer O’Rourke, Analyste en prospective
Peter Padbury, Futuriste en chef
Rhiannen Putt, Analyste principale en prospective

Plusieurs membres d’Horizons ont contribué à ce rapport, que ce soit en fournissant du leadership et de la facilitation, ou en effectuant de la recherche, de la rédaction et de la conception, à savoir : Kristel Van der Elst, Emma Garand, Ian Lambert, Nelly Leonidis, Chris Hagerman, Alain Piquette, Sven Schirmer, Eric Ward, et Nadia Zwierzchowska.

Nous aimerions remercier les nombreux ministères, organismes, intervenants et experts qui ont contribué à notre travail sur ce rapport. Nous voudrions particulièrement remercier Ryan Boyd (Centre pour l’innovation en matière de politiques, Le Bureau du Conseil des ministres de l’Ontario), Chrysandre Courchêne (Innovation des affaires RH, direction générale des Services en ressources humaines, Emploi et Développement social Canada), et Adon Moss (Centre pour l’innovation en matière de politiques, Le Bureau du Conseil des ministres de l’Ontario). Les idées présentées dans ce rapport ne reflètent pas nécessairement les points de vue exprimés par les personnes interviewées.


Notes de référence

[1] L. Vitaud, “The Unbundling of Jobs and What it Means for the Future of Work,” Medium, dernière modification le 15 mai 2018, https://medium.com/blockchain-and-the-distributed-workforce/the-unbundling-of-jobs-and-what-it-means-for-the-future-of-work-9d04a50767bc.

[2] European Commission, “Digital employment platforms gaining a foothold in Europe’s labour markets,” EU Science Hub, dernière modification le 27 juin 2018, https://ec.europa.eu/jrc/en/news/digital-employment-platforms-in-europe.

[3] P. ex. Uber, Yelp et LinkedIn utilisent de tels systèmes. A. Griswold, “Good luck leaving your Uber driver less than five stars,” Quartz, dernière modification le 5 avril 2018, https://qz.com/1244155/good-luck-leaving-your-uber-driver-less-than-five-stars/.  J. Hawkins, “Yelp vs Google: How they deal with fake reviews,” Search Engine Land, dernière modification le 1 novembre 2018, https://searchengineland.com/yelp-vs-google-how-do-they-deal-with-fake-reviews-307332. D. Ramachandran, “Reputation Score is the Ultimate Measure of Brand Trust,” Linkedin, dernière modification le 31 octobre 2016, https://www.linkedin.com/pulse/reputation-score-ultimate-measure-brand-trust-dilip-ramachandran.

[4] N. Kobie, “The complicated truth about China’s social credit system,” Wired, dernière modification le 21 janvier 2019, https://www.wired.co.uk/article/china-social-credit-system-explained.

[5] E. Xiao, “Tencent’s new credit system to use payments, social data,” Techinasia, dernière modification le 31 janvier 2018, https://www.techinasia.com/tencent-credit-launch.

[6] “The Future of Jobs Report 2018,” World Economic Forum, dernière modification le 17 septembre 2018, http://www3.weforum.org/docs/WEF_Future_of_Jobs_2018.pdf.

[7] L. F. Katz and A. B. Krueger, “The Rise and Nature of Alternative Work Arrangements in the United States, 1995-2015,” ILR Review, 72.2 (2019) 382-416, https://krueger.princeton.edu/sites/default/files/akrueger/files/katz_krueger_cws_-_march_29_20165.pdf.

[8] Y. Noguchi, “Freelanced: the Rise of The Contract Workforce,” NPR, dernière modification le 22 janvier 2018, https://www.npr.org/2018/01/22/578825135/rise-of-the-contract-workers-work-is-different-now.

[9] M. Koetse, “Insights into Sesame Credit & Top 5 Ways to Use a High Sesame Score,” Whats On Weibo, dernière modification le 7 novembre 2018, https://www.whatsonweibo.com/insights-into-sesame-credit-top-5-ways-to-use-a-high-sesame-score/.

[10] “A.I. Automated Assistant,” Zoom.ai, https://zoom.ai/.

[11] “Semi-autonomous truck platooning – how does it work?” Scania Group, YouTube, publié le 29 janvier 2018, https://www.youtube.com/watch?v=lpuwG4A56r0.

[12] E.g. HiredScore and Pymetrics.  On the latter, J. Constine, “Pymeterics attacks discrimination in hiring with AI and recruiting games,” Techcrunch, dernière modification le 20 septembre 2017, https://techcrunch.com/2017/09/20/unbiased-hiring/.

[13] J. Vincent, “Welcome to the Automated Warehouse of the Future,” The Verge, dernière modification le 8 mai 2018, https://www.theverge.com/2018/5/8/17331250/automated-warehouses-jobs-ocado-andover-amazon.

[14] N. Case, “How to Become a Centaur”, JDS, dernière modification le 6 février 2018,   https://jods.mitpress.mit.edu/pub/issue3-case.

[15] “About Centauro,” European Union Centaruro Project, http://www.centauro-project.eu/about-centauro.

[16] E.g. see SMACC, https://www.smacc.io/en/.

[17] E.g. see Zest Finance, https://www.zestfinance.com/.

[18] P. Petrone, “Why It’s Really Good to Be a Data Scientist Right Now,” Linkedin, dernière modification le 20 août 2018, https://learning.linkedin.com/blog/tech-tips/why-it-s-really-good-to-be-a-data-scientist-right-now.

[19] E.g. see DataRobot, https://www.datarobot.com/about-us/.

[20] E.g. see Veriato, https://www.veriato.com/.

[21] “Artificial Intelligence Solutions: Expanding the physician’s view,” Merge, http://www.merge.com/Solutions/Artificial-Intelligence.aspx.

[22] I. Steadman, “IBM’s Watson is better at diagnosing cancer than human doctors,” Wired, dernière modification le 11 février 2013, https://www.wired.co.uk/article/ibm-watson-medical-doctor.

[23] J. Kent, “How Artificial Intelligence is Changing Radiology, Pathology,” HealthAnalytics, dernière modification le 3 août 2018, https://healthitanalytics.com/news/how-artificial-intelligence-is-changing-radiology-pathology.

[24] “The role of AI in big data analytics,” Information Age, dernière modification le 26 février 2018, https://www.information-age.com/role-ai-big-data-analytics-123470981/.

[25] M. Yao, “Chihuahua or muffin? My search for the best computer vision API,” FreeCodeCamp, dernière modification le 12 octobre 2017, https://medium.freecodecamp.org/chihuahua-or-muffin-my-search-for-the-best-computer-vision-api-cbda4d6b425d?gi=6f7f691e5d1d.

[26] “Top 10 Digital Health Mergers And Acquisitions Show Trends For 2019,” The Medical Futurist, dernière modification le 8 janvier 2019, https://medicalfuturist.com/digital-health-mergers-and-acquisitions-2018.

[27] E.g. see LawGeex, https://www.lawgeex.com/aboutus/.

[28] S. O’Hear, “LawGeex raises $12M for its AI-powered contract review technology,” Techcrunch, dernière modification le 17 avril 2018, https://techcrunch.com/2018/04/17/lawgeex-raises-12m-for-its-ai-powered-contract-review-technology/.

[29] J. Wood, “This AI outperformed 20 corporate lawyers at legal work,” World Economic Forum, dernière modification le 15 novembre 2018, https://www.weforum.org/agenda/2018/11/this-ai-outperformed-20-corporate-lawyers-at-legal-work/.

[30] M. Roller, “Oxford academics launch ‘blockchain university’,” Cherwell, dernière modification le 22 mars 2018, https://cherwell.org/2018/03/22/oxford-academics-launch-blockchain-university/.

[31] A. Munro, “Microsoft turns to blockchain smart contracts for royalty payments,” Finder, dernière modification le 25 juin 2018, https://www.finder.com.au/microsoft-turns-to-blockchain-smart-contracts-for-royalty-payments.

[32] Samsung’s Family Hub refrigerator, which employs their Bixby Vision AI, https://www.samsung.com/global/galaxy/apps/bixby/vision/.

[33] C. Murray, “Predictive Maintenance can Benefit All Manufacturers,” Design News, dernière modification janvier 2019, https://www.designnews.com/industrial-machinery/predictive-maintenance-can-benefit-all-manufacturers/64099930860063.

[34] E.g. Amazon and Netflix.

[35] “Maersk and IBM Unveil First Industry-Wide Cross-Border Supply Chain Solution on Blockchain,” IBM, dernière modification le 5 mars 2017, https://www-03.ibm.com/press/us/en/pressrelease/51712.wss.

[36] M. Burgess, “Mercedes vans filled with swarming delivery bots could be heading to your hometown,” Wired, dernière modification le 16 septembre 2016, https://www.wired.co.uk/article/mercedes-starship-drones-delivery-van.

[37] T.C. Rosenthal, “Vans & Drones in Zurich: Mercedes-Benz Vans, Matternet and siroop start pilot project for on-demand delivery of e-commerce goods,” Daimler, dernière modification le 28 septembre 2017,

[38] “Smart Contracts: The Best Way to Make a Deal,” Newsbtc, dernière modification le 13 mai 2018, https://www.newsbtc.com/2018/05/13/agrello-smart-contracts-best-deal-making-way/. E.g. see Agrello, https://www.agrello.io/.

[39] “Healthcare,” E-Estonia, https://e-estonia.com/solutions/healthcare/e-health-record/.

[40] “The iLabour Project: Investigating the Construction of Labour Markets, Institutions and Movements on the Internet,” Oxford Internet Institute, University of Oxford, dernière modification le 1 avril 2019, http://ilabour.oii.ox.ac.uk/online-labour-index/.

[41] E.g. see “Mine of the Future,” Rio Tinto, accédé le 1 avril 2019, http://www.riotinto.com/australia/pilbara/mine-of-the-future-9603.aspx.

[42] J. Stewart, “Sweden’s Electric Robot-Truck is made for life in the forest,” Wired, dernière modification le 12 juillet 2018, https://www.wired.com/story/einride-t-log-electric-autonomous-self-driving-truck/.

[43] J. Shaw, “applying AI to UAV Data for Oil & Gas Pipeline Inspections,” ELE.ai, dernière modification le 10 janvier 2019, https://ele.ai/2019/01/10/applying-ai-to-uav-data-for-oil-gas-pipeline-inspections/.

[44] E.g. see “Remote Medical Care: Modern diagnostics without leaving home,” Comarch, accédé le 1 avril 2019, https://www.comarch.com/healthcare/products/remote-medical-care/. For interventions see, R. Eveleth, “The surgeon who operates from 400km away,” BBC Future, dernière modification le 16 mai 2014, http://www.bbc.com/future/story/20140516-i-operate-on-people-400km-away.

[45] N.L. Pesce, “These 10 cities, states and countries will pay you to move there,” MarketWatch, dernière modification le 3 janvier 2019, https://www.marketwatch.com/story/these-9-cities-states-and-countries-will-pay-you-to-move-there-2018-10-26.

[46] L. Begley Bloom, “Vermont Wants To Pay You $10, 000 To Move There And Work,” Forbes, dernière modification le 3 juin 2018, https://www.forbes.com/sites/laurabegleybloom/2018/06/03/vermont-wants-to-pay-you-10000-to-move-there-and-work/#1d44ecf311c9.

[47] “World Renowned Tofino Innovating to Become a Workplace Destination for Global Nomads,”  Cision, dernière modification le 25 mai 2018, https://www.newswire.ca/news-releases/world-renowned-tofino-innovating-to-become-a-workplace-destination-for-global-nomads-683692841.html.

[48] S. Perez, “Wayfair’s Android app now lets you shop for furniture using augmented reality,” Techcrunch, dernière modification le 20 mars 2018, https://techcrunch.com/2018/03/20/wayfairs-android-app-now-lets-you-shop-for-furniture-using-augmented-reality/.

[49] Begley Bloom, “Vermont Wants To Pay You.”

[50] E.g. see “Mine of the Future,” Rio Tinto, accédé le 1 avril 2019, http://www.riotinto.com/australia/pilbara/mine-of-the-future-9603.aspx.

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Policy Horizons | Horizons de politiques

Horizons de politiques Canada, également connu sous le nom de Horizons de politiques, est une organisation au sein de la fonction publique fédérale qui mène des activités de prospectives stratégiques sur des enjeux transectoriels qui informent les fonctionnaires sur les conséquences des politiques publiques possibles au cours des 10 à 15 prochaines années.

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